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mercredi 25 avril 2012

Masayoshi Sukita, David Bowie, Shuji Terayama


«  C’est un homme galant et moustachu.
Une fleur à la bouche lui irait bien.
S’il a avale de la salade en mettant un disque des Rolling Stones, c’est qu’une atmosphère facile et frivole flotte autour de lui. Mais cela n’est qu’un «masque» pour survivre dans le monde de la photo, gouverné par le système marchand. En réalité, rien de cela ne l’abuse.
Il a souvent photographié des musiciens du monde entier. Mais il a toujours tiré de ces portraits, non seulement la beauté du sujet, mais encore les aspects vénéneux cachés derrière les expressions.
Les personnages étranges qui, dans ses films publicitaires, disparaissent en un clin d’œil en en laissant derrière eux que leurs costumes, ou bien encore ceux dont les visages deviennent invisibles, cachés par des oiseaux, voilà ce qui montre assez ce qui l’incline vers le surréalisme.
Il s’est chargé des prises de vues de mon film Jetons les livres, sortons dans la rue. Ses images comportent quelque chose de rarement vu dans le cinéma japonais. Dans la scène de football, on a lancé la caméra à la place du ballon, et on a joué le match. Dans la scène d’amour, l’actrice caressait la caméra.
Notre équipe était étonnée par ses tentatives d’introduire la caméra à l’intérieur du drame, par son désir de faire participer la caméra elle-aussi à la scène, au lieu de la cantonner à son rôle d’observateur.
Si les photographes essaient de saisir le monde invisible à nos yeux - le monde imaginaire - Sukita serait vraisemblablement celui qui s’ingénierait à être parmi les premiers. »

Shuji Terayama
Zoom n°45, juillet 1977






D'autres images de David Bowie par Masayoshi Sukita ici

Ainsi l'auteur de certaines des plus mythiques photos de David Bowie est également le directeur de la photographie de Jetons les livres, sortons dans la rue, chef-d'oeuvre de l'expérimental rock de Terayama. Il n'y a jamais de hasard.  

lundi 7 mars 2011

Je serai une putain du rock ‘n’ roll pour toi



Le plus beau dans le Ziggy Stardust -The Motion Picture de D.A. Pennebaker, ce n’est pas seulement Bowie qui de station en station construit la légende de Ziggy, mais son contrechamp : ces jeunes filles dont Pennebaker saisit le visage dans la pénombre, entre deux flashs de stroboscope.
Bouleversées, en larmes ou en extase, elles inventent des chorégraphies secrètes pour Lui et pour Lui seul.  A l’étrangeté de Ziggy, que la maigreur rend presque immatériel, Pennebaker tente de saisir une autre étrangeté, celle des adolescentes et ce qu’elles livrent en cet instant. Ce qu’elles nourrissent dans l’intimité de leurs chambres, elles l’exposent ici, sans fard, répondant aux moindres œillades, aux moindres coups de reins de Ziggy. "Je serai une putain du rock ‘n’ roll pour toi". On ne peut pas rêver plus tendre déclaration d’amour.
C’est le dernier concert de Ziggy, filmé ce fameux soir du 3 juillet 73 à l’Hammersmith Odéon de Londres. Pennebaker capte l’incandescence de Bowie, telle que jamais il ne la retrouvera, comme il attrape au vol,  sur quelques photogrammes, ces fugitifs et précieux instantanés d’adolescence.


samedi 8 janvier 2011

Curiosités spatiales



Depuis mon adolescence, je crois n’avoir jamais écouté autant David Bowie que ces derniers temps. Son silence persistant, les rumeurs sur sa maladie, ont peut-être suscité le besoin d’entendre encore sa voix. Et de se plonger dans des albums que j’avais négligé comme les magnifiques Heathen et Reality.
De vieilles interrogations ressurgissent. On sait que Bowie a choisi son nom de scène d’après le Bowie Knife, créé Jim Bowie, colonel mort à Alamo. Pourtant, à cause de Space Oddity, inspiré de 2001, j’avais plus volontiers fait le rapprochement avec le personnage de Dave Bowman interprété par Keir Dullea, britannique auquel je trouvais une légère ressemblance avec Bowie. Pure coïncidence puisque Bowie a choisit son surnom en 1967, soit deux ans avant la sortie de 2001.
En revanche, aucune coïcidence dans le fait que Duncan Jones, le fils de Bowie, ait réalisé Moon, double hommage à Kubrick et à Space Oddity.



jeudi 3 juin 2010

Passage du miroir. Notes sur le clip Thursday's Child (David Bowie)




Ça commence par le chantonnement d'un homme face à son miroir et par une terrible expression d'amertume.



Chantonner pour soi, presque malgré soi, comme pour appeler un être intérieur. 
Déjà le souvenir est au travail.



La chanson qui sort d'un transistor parfois glisse sur les lèvres de l'homme. Mais jamais elle ne s'incarne. 
Le bruit de l'eau qui coule dans le lavabo et une toux viennent même la recouvrir. 
Ces petits sons du réel valent comme une condamnation.
L'envol de la musique est refusé à Bowie, rivé, impitoyablement, à son présent.
Il semble surpris de se retrouver dans ce cadre, cette vie, avec cette femme belle, mais dont il parait soudain lointain.



Le miroir est en soi un faux raccord, où rien n'est tout à fait exact. Qui de moi ou du reflet cherche à percer le mystère de l'autre ? Est-ce moi qui voit mon double rajeuni ou, de l'autre côté du temps, un jeune homme qui contemple le futur ?
Le masque n'est pas celui d'un rockeur extraterrestre, d'un cosmonaute ou d'un clown mais c'est le masque de l'âge et des rides collé à la peau.




L'instant du rajeunissement use d'un vieux trucage de cinéma, une surimpression comme lorsque le crâne vient hanter le visage de Norman à la fin de Psychose.




L'Autre est certes rajeuni mais surtout, les yeux creusés et les joues émaciés. 
C'est une tête de mort.




Une jeune fille apparaît à côté de l'Autre.




Derrière le miroir obscur, ils l'observent comme un couple de vampire. Inquiétants étrangers.





Instant du double où le travelling circulaire transporte l'homme à travers le miroir, et le dépose à côté de la jeune fille. Il se penche vers elle et lui donne un baiser.



L'impossible baiser à travers le temps.



Thursday Child (1999)
Réalisation Walter Stern