lundi 31 octobre 2011

Etrange petite fille



Si les films sont les fantasmes de la vie, les vidéo-clips sont le fantasme de ces fantasmes. Adolescents, on pouvait tomber amoureux d’actrices, mais souvent et plus encore de ces créatures anonymes que l’on apercevait dans les video-clips. Cet amour durait le temps de la diffusion du clip à la télévision, et leur visage s’évanouissait peu à peu. Qui étaient-elles d’ailleurs ? Apprenties comédiennes ou mannequins ? Groupies des chanteurs ou clientes d’une boutique de vêtements punks à Londres ? Leurs 3mn de célébrité stockées dans les archives des maisons de disques, on ne pensait jamais les revoir. Et puis est arrivé Youtube. Les vidéo-clips devenaient des capsules temporelles idéales où nous retrouvions ces figures du passé, figées dans leur adolescence et bien plus encore dans notre adolescence. Celle qui pourrait toutes les résumer serait la jeune fille de Strange Little Girl des Stranglers. Une punkette parmi d’autres, un peu à la dérive dans la grande ville ; une proie facile pour les étrangleurs qui rodent.
Tes yeux noirs et ton sourire, au fond, on ne les avait jamais oubliés.



L'Atalante par Roland Topor


jeudi 27 octobre 2011

Kotaro Okoshi



" One day I asked a high school friend of mine about her hobbies and she answered "Plastic models." And another high school girl told me she was way into military uniforms. She's so into uniforms that she's even got a German officer's uniform from WW2! Then there was another girl in my class named Hiromi, she picked up this giant larva and said she wanted to be an entomologist when she grows up."
Kotaro Okoshi
(Texte de page de garde de Figuisch)

Affiches de films français, versions japonaises





Celle-ci n'est pas une affiche japonaise mais est tout de même très belle.






Les affiches sont issues du catalogue de l'exposition "Affiches de films français de l'après-guerre" au National Film Center de Tokyo,  janvier-mars 2010.


samedi 22 octobre 2011

Isabelle possédée


Entre 1975 et 1983, Isabelle Adjani fut la plus grande actrice du cinéma français. Deneuve, de dix ans plus âgée incarnait «la» française, façonnée YSL. Huppert, sa contemporaine, était déjà précise et cérébrale. Adjani apporta quelque chose d’inconnu, ne relevant d’aucune tradition, qui ne passait pas par l’intellect, qui refusait même sa propre beauté. Finalement proche d’une Barbara Steele, elle fut l’actrice du sang et de la folie - pionnière d’un territoire où seule peut-être Asia Argento et Béatrice Dalle se risqueront par la suite.
D’abord vinrent les fiancées gothiques : Adèle H, l’amoureuse hantée ; Lucy la somnambule qui retient jusqu’à l’aube la sangsue Nosferatu ; Emily Brontë, bien sûr, et son royaume imaginaire. Le danger était qu’elle ne soit plus, comme disait Zulawski, que cette petite chose pâle et tremblante.
Et puis, en 1981, alors qu’elle n’avait que 26 ans, elle devint un monstre, avec le film dont le titre pouvait alors tout entière la résumer : Possession.
Berlin. Une femme double dans une ville double, amante et mère nourricière d’une créature tentaculaire, lointaine évocation du poulpe d’Hokusai. Lors de la scène de démence dans le métro, Adjani est née comme monstre de cinéma, mais morte aussitôt car aucun film, en France en tout cas, ne pouvait l’accueillir. Son territoire est ici celui des arts corporels, dans leur versant le plus extrême. Herman Nitsch et les actionnistes viennois, car son hystérie est aussi politique - incarnation de la colère d’un Polonais exilé ; une sorte de butô occidental car au milieu de la folie, elle n’abandonne pas une certaine stylisation des gestes. La robe bleue tachée de lait, de vomi et de sang, plaquée à sa peau dessine un corps obscur à l’organicité répulsive. Adjani, se hisse alors au niveau des grandes actrices des années 70, les seules dont on devrait se souvenir : les créatures transgressives du cinéma d’horreur et pornographique des années 70, Sissy Spaceck, méduse blanche et sorcière rouge  dans Carrie ; Georgina Spelvin et la masturbation abrasive et sans libération de la fin de The Devil in Miss Jones ; Marilyn Chambers, corps absolu du plaisir chez les frères Mitchell (Derrière la porte verte) et vampire chez Cronenberg (Rabid) ; Lina Romay et ses orgasmes sanglants et effrayants chez Jess Franco...
Adjani laissera le monstre à Berlin et deviendra une femme fatale plus classique dans l’adaptation ratée de Mortelle randonnée par Claude Miller ou encore dans L’Eté meurtrier. Le sang et la folie reviendront dans La Reine Margot et Camille Claudel, mais mis sur un piédestal, théâtralisés et trop conscient d’eux-mêmes.
Ce que l’on voyait dans Possession, qui terrifiait, émouvait et enchantait, c’était aussi la passion brute d’une jeune femme pour son métier d’actrice.


mardi 18 octobre 2011

dimanche 16 octobre 2011

C’était d’une cicatrice intérieure qu’il s’agissait


En 1970, Philippe Garrel tourne La Cicatrice intérieure dans les déserts d’Islande, du Nouveau Mexique et d’Egypte. La caméra tourne en travelling circulaire, creusant ce sillon intérieur, à l’image, au temps et à l’espace.
Au même moment, son père, Maurice Garrel, tourne Les Soleils de l’île de Pâques de Pierre Kast, en France, au Chili et au Brésil. 
Des germes poussent dans les paumes des mains des personnages, élus pour rencontrer un peuple venu des étoiles, sur la fameuse île aux statues. Nous sommes quelque part entre Chris Marker et les petites livres rouges de J’ai Lu, l’aventure mystérieuse. Le film passe de temps en temps sur les chaînes du câble. C’est un film d’après-midi d’été, je le regarde du coin de l’œil, ou plutôt d’une oreille puisque j’aime la mélopée de la voix-off de Garrel et les accents des actrices.
Mais ce qui me trouble est précisément ce passage, lorsque Garrel découvre l’étrange marque dans sa main.


«Seulement plus tard, je me souviendrai de cette minuscule brûlure comme un point de départ. Cette même nuit, à l’issu d’une longue série de travaux de recherche, un étrange flot d’images, sans lien logique apparent, m’envahit l’esprit pour la première fois. Emergeant de cette transe, je reprenais mes esprits, quand je vis apparaître sur ma paume, ce que je pris d’abord pour un objet : une sorte de plaque de nacre, que je crus posé dans ma main. Pourtant, je dus me rendre à l’évidence qu’elle faisait partie de moi.
Elle était insensible comme un ongle, impossible de l’arracher. Aucune douleur ni au centre ni sur la périphérie. Aucune inflammation.
Si c’était la croute d’une cicatrice, c’était à coup sûr d’une cicatrice intérieure qu’il s’agissait.»
Comment ne pas voir ici un message secret laissé par Maurice à Philippe.
La marque comme le lien qui les unit.
Le père et le fils toujours accordés.



Les Soleils de l'île de Pâques également sur le Blog of Terror


http://blogofterror.blogspot.com/2011/10/les-soleils-de-lile-de-paques-1970.html