samedi 26 novembre 2011

Samouraïs soniques au musée du Quai Branly


Hier soir, un «before» au musée du Quai Branly, à l’occasion de l’expo consacrée aux samouraïs et surtout à leurs armures.
Il y avait un mini-concert de Yoko Higachi (la danseuse butô qui fait la couverture de mon livre sur les fantômes du cinéma japonais) sous son identité musicale de HamaYoko. Des mélopées telluriques, se perdant en échos. Evidemment porté par le charisme de l’interprète, ici en kimono, évoquant quelque terayamaesque créature.



Ensuite Doravideo (Batteur de Acid Mother Temple) qui a remixé quelques classiques du film d’action asiatique, dont Kill Bill (eh oui, je tiens la scène des Crazy 88 pour un classique), un film dont le titre m’échappe mais avec Sho Aikawa (un Miike ?) et le premier épisode de Baby Cart. Avec un petit clavier,   Doravideo sample et mixe en direct les images et les sons (très thrash metal). C’est probablement une des expériences cinématographique de l’année et la découverte d’un génie du montage.
Enfin, visite à l’expo samouraï. Au fond, à part peut-être chez Kurosawa (et l’on miserait alors sur la direction artistique), on ne voit jamais vraiment à l’écran les armures des samouraïs. On ne perçoit pas comment la fonction première de ces masques était d’inspirer avant tout l’effroi. Dans la fureur des combats, le sang, et les mutilations, le samouraï devenait, en apparence et en acte, un démon.



.... et pour donner une touche d'exostime sexy, les modèles de Dr. Sketchy Anti-Art School posaient pour les photographes et dessinateurs.


mercredi 23 novembre 2011

Les Malheurs de Sophie par Guy Sabran (2)


Les Malheurs de Sophie par Guy Sabran (1)



Sophie (1858) est la plus fascinante des héroïnes pour la jeunesse française. Sadique, adepte de l’automutilation et des expériences extrêmes, elle serait de nos jours envoyée directement chez le pédopsychiatre. La comtesse de Ségur (née Rostopchine mais dont le prénom n'est autre que Sofia) détaille froidement, presque cliniquement, les diverses expériences de Sophie. Un tel texte aurait dû exciter l’imagination des illustrateurs. Il n’en n’a rien été. Les images de la Bibliothèque rose ou d’autres éditions sont généralement d’une mièvrerie impressionniste, faisant la part belle aux jolies robes et aux coiffures de Sophie et de sa mère Madame de Réan.
Pourtant, il y a quelques années, je dénichais dans une brocante une édition de la bibliothèque Rouge et Or, datant de 1947, illustrée par Guy Sabran. Enfin, le texte trouvait un dessinateur à sa mesure : moderne, étrange, déviant. Il y a chez Sabran un goût pour les disproportions, les regards exorbités et la cruauté (la poupée disloquée et presque ensanglantée) qui en font un parent éloigné de l’underground. Nous ne sommes pas loin de Blanquet. On ne sait pas grand chose de Sabran,
ici
outre qu’il fut le frère du prolifique auteur de romans populaires Paul Berna
ici
dont il illustra les aventures de Zoupette, cousine de Martine.


Bref, un illustrateur qu’il faudra redécouvrir un de ces jours.


samedi 19 novembre 2011

Pourquoi les papillons en veulent-ils autant aux jeunes filles japonaises ?



1. Kazuo Umezzu

2. Osamu Tezuka
3. Inconnu

Les entrailles de l'ange

Angel Guts: Red Classroom (1979) de Chusei Sone, scénario Takashi Ishii

Muraki, éditeur de magazines érotiques, assiste à la projection privée d’un film déjà ancien : une lycéenne se faisant violer par 5 hommes dans une salle de classe. Muraki est bouleversé par le visage de la jeune fille, qui tombe en syncope au terme de son viol et se relève, dénué de toute expression, et retombe encore. Le viol était-il réel ? A-t-il assisté à la destruction d’un être humain.


Muraki retrouve la jeune fille, nommée Nami, au guichet d’un Love Hotel, cadre d’une séance photo. Il lui donne rendez-vous; ils vont à l’hôtel mais il refuse de lui faire l’amour. «Je veux te revoir demain» lui dira-t-il. Mais elle ne viendra pas ; elle lève un homme dans un bar et nous aurons l’exemple de sa folie : une sexualité violente et insatiable. 



Muraki ne cesse pourtant pas de l’aimer. 3 ans plus tard, alors qu’il erre ivre dans les ruelles de Golden Gai, il la voit dans l’embrasure de la porte d’un bar. Il tente de l’entraîner avec lui mais le patron, amant de Nami, le roue de coups dans un terrain vague. Il revient pourtant le lendemain et se fait à nouveau battre, mais cette fois il reste dans le bar.
Il observe alors les activités de Nami qui se donne sur le comptoir à 5 hommes, reproduisant le film initial... et il voit aussi que l’on sort une lycéenne ligotée, d’une trappe, et qui est violée à son tour.
Ce qui a détruit nami, au-delà encore de son viol, c’est le film lui-même, qui a volé son image, transformant son supplice en spectacle, le réitérant à chaque projection. On a atteint ici la plus infernale des dégradations. Nami non seulement reproduit les conditions de son viol mais remet en scène le spectacle de la destruction de son innocence sur une autre jeune fille.


Devant le bar, Nami semble sortir d’une vision néo-sirkienne de Fassbinder, un glamour corrompu. Elle entraîne Muraki dans son monde, absolument disloqué. C’est le passage le plus beau du film, expérimental et inattendu. Des plans de vitesse et d’énergie traversent la scène qui déstructure en faux raccord. Mais cette énergie ne va nulle part, ce n’est qu’une convulsion.