mercredi 16 novembre 2011

Qui est Simon Yotsuya ?



Le hasard objectif fait toujours bien dans les choses, surtout dans les bibliothèques. La semaine dernière, je flânais à celle de la MCJP. Au rayon des ouvrages sur les jouets, je découvrais un grand livre rouge, catalogue de l’exposition consacrée à Simon Yotsuya, créateur de poupées. Sans connaître son nom, j’avais déjà vu ses œuvres dans un numéro de Yaso consacré à Bellmer.




Le livre présentait un étrange personnage, un très beau travesti photographié par Eikoh Hosoe et plusieurs de ses créations allant de «classiques» poupées d’inspiration bellmerienne à des simulacres plus inquiétants. Un jeune garçon ouvrant son abdomen pour dévoiler ses entrailles comme un mannequin anatomique ;



d’autres jeunes garçons et filles, dont l’armature dévoilée contrastait de façon dérangeantes avec l’hyperréalisme de leurs traits, de leur peau de plastique et de leurs organes génitaux ;




plus insolites encore des poupées adultes, musculeuses et barbues, aux traits anodins mais mélancoliques.


Simon Yotsuya... avec son curieux prénom français... parfois appelé Shimon Yotsuya. Il y avait du Molinier chez lui, autant que du Bellmer. En tout cas un de ces artistes japonais flamboyant et excentrique comme je les affectionne. Je me promettais de faire des recherches sur le personnage... Une pièce cruciale m’apparut aujourd’hui. Toujours à la MCJP, je lisais un gros catalogue d’exposition sur les avant-gardes japonaises. Le Labyrinthe d’herbes de Terayama passant le soir même, j’allais au chapitre du théâtre. On parlait de évidemment de Terayama, mais aussi de Juro Kara et de sa troupe Jokyo Gekijo et ses comédiens incroyables : Akaji Maro, Reisen Ri et... Simon Yotsuya. Le créateur de poupées faisait donc partie d’une des plus tumultueuses troupes d’avant-garde japonaise des années 60.
Le meilleur document possible sur le Jokyo Gekijo est le film d’Ôshima, Journal d’un voleur de Shinjuku en 1969. Il y a tout, Juro Kara, ogre charismatique et sensuel, la tente rouge du temple de Hanazono à Shinjuku (oui, celui que l’on traverse souvent la nuit pour aller à Golden Gai) et ses comédiens fardés, outranciers, dont Simon Yotsuya - si j’ignorais son nom, son visage ne m’était donc pas inconnu.



C’est l’une des particularités de l’avant-garde japonaise, peut-être due au petit périmètre où évoluait ses acteurs, essentiellement Shinjuku, de les voir circuler entre les catégories artistiques (le héros du Journal d’un voleur n’est autre que Tadanori Yokoo, star du pop art japonais).
Mais tout ça, au fond, ne me dis pas qui est vraiment le créateur de poupées Simon Yotsuya. Une affaire à suivre.


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