mardi 6 mars 2012

Je ne suis jamais sorti du musée

Dressed To Kill (Brian De Palma, 1981)

Toujours j’en reviens à la scène du musée de Pulsions (Dressed to Kill), moment fondateur de ma cinéphilie. Lorsque j’écrivais ma maîtrise, presque entièrement consacrée à la séquence, ce musée newyorkais, surplombé par la statue de Diane chasseresse, je l’ai arpenté, pendant des mois en compagnie d’Angie Dickinson. J’y suis revenu souvent depuis, mais particulièrement depuis deux ans lorsque j’en fais l’analyse avec mes étudiants. 
Cette fois-ci, je leur soumettais un problème que pose l’analyse de film. Un film se déroule linéairement alors que l’analyse s’élabore de façon volumétrique. On devrait pouvoir considérer l’analyse comme la modélisation d’un objet de réflexion filmique. C’est-à-dire pouvoir comparer des scènes ou des plans espacés dans le temps en les juxtaposant, ce que ni le matériel (un seul lecteur DVD) ni le temps et le salaire des chargés de cours ne permet de faire. Il y a dans la scène du musée de Pulsions la tentation par De Palma de justement créer un espace virtuel, où le film procède à son auto-analyse. Ce sont par exemple les flash-back incrustés dans l’image-même. 



Ou les dédoublements de la figure de Kate Miller. Ici : elle croise son double, une bourgeoise blonde, se promenant calmement dans le musée, alors qu’elle-même est déjà exorbitée par son désir.




Mais on aimerait aller plus loin et vraiment démonter et remonter la scène et mettre au jour les autres films, cachés, qui se jouent dans les allées et couloirs.
Ainsi, j’incitais mes élèves à regarder les arrières plans, ces petites saynètes, qui font dévier le statut du musée de lieu déterminé où l’on vient pour une occupation précise (regarder des œuvres d’art) à un lieu flou de drague et d’approches sexuelles.
Ainsi, Kate observe amusée, un homme aborder une femme seule. Comme chez Hitchcock les hommes sont toujours brun et les femmes blondes (c’est le petit détail qui aurait déjà dû perdre Michael Caine : un homme blond ne peut-être qu’une femme).
Au cours de la scène du musée, on retrouve plusieurs fois ce couple et l’on suit la progression de leur relation. 
Jusqu’à ce plan, un peu terrifiant, où il marchent derrière l’homme aux lunettes noires, l’amant chimérique que Kate poursuit à travers les couloirs. Un trio de spectres qui accompagne Kate dans sa marche fatale vers la mort.








Les «locations» de Dressed to Kill à New York ici

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