mardi 28 juillet 2009

Spectre (The Boogeyman, 1980) d'Ulli Lommel





Ulli Lommel est un cinéaste étrange qui a commencé sa carrière avec Fassbinder pour qui il fut acteur (L'Amour est plus froid que la mort, 1969). Son second film en temps que réalisateur, La Tendresse des loups (Die Zärtlichkeit der Wölfe, 1973) s'inspire des crimes de Fritz Haarmann, le boucher de Hanovre, interprété par Kurt Raab. Aux Etats-Unis, il tourne le film underground Blank Generation sur la scène punk (à ne pas confondre avec le film éponyme d'Amos Poe), dans lequel apparaît Andy Warhol, puis en collaboration avec sa compagne, Suzanna Love, s'oriente vers le film d'horreur. Il réalise actuellement pour la vidéo des films inspirés de cas de tueurs en série (Green River Killer - 2005, Curse of the Zodiac - 2007) semble-t-il atypiques et très critiques envers la société américaine.




Sombres pâturages

Halloween. Des enfants masqués cavalent dans les champs au crépuscule. Un prêtre, figé comme un épouvantail, les regarde passer en souriant. Mais son sourire n'a rien de rassurant. On imagine volontiers qu'il leur enseigne moins les évangiles qu'un culte impie, forcément impie. Comme dans un cauchemar, le prêtre court avec les enfants. Ambiance de folie et de perversion. L’étrange équipée entre dans une maison et…. ni le prêtre, ni les enfants ne reviendront par la suite.
(Ce petit préambule n'est pas présent dans la version cinéma, en tous cas française.)


Spectre 1
envoyé par 2sadakobanana -



Le Malin

Des enfants, petits chasseurs de la peur, épient derrière une fenêtre leur mère et son amant. Dans ce salon, bien plus allemand qu'américain, se joue un kammerspiel poisseux : la femme en déshabillé, l’amant en tricot de peau, la bouteille de bourbon... Lommel construit son prologue comme un mauvais rêve freudien. Le visage déformé par un bas, l’homme attrape le garçon et le ligote pour le punir de son voyeurisme. Mais un couteau de cuisine circule, tranche les liens de l'enfant et se plante dans le dos de l'amant... Trauma originel, base de tout slasher.


spectre 2
envoyé par 2sadakobanana -



Comme des enfants perdus



Bien qu'ils soient devenus adultes, Lacey et son frère Willy sont restés des enfants apeurés qui ne parviennent pas à se séparer. Le garçon n'a plus prononcé un mot depuis le meurtre de son tortionnaire. Solitaire, ombrageux, il lutte pour résister à l'éclat des couteaux. Quant à sa sœur, elle est devenue une belle jeune femme mais toujours mélancolique. Parfois, au cours de séances de psychanalyse une autre voix parle par sa bouche.



Une lettre de leur mère qui désire les revoir avant sa mort déclenche le retour du mal et de la mort enfouis dans leurs souvenirs.
Pourtant, cette mère, les enfants n'iront pas à sa rencontre.


Les miroirs n'oublient jamais

Dans la maison d'enfance, de l'autre côté du miroir, le croquemitaine attend l'heure de sa libération. L'image est belle et terrifiante. L'homme sans visage, l'unheimlich malveillant, se dissimule dans l'inconscient et s'en échappe lorsque le miroir est brisé... chaque éclat devient le foyer de la hantise et palpite de méchanceté. Le spectre hante alors la petite contrée et les meurtres s'enchaînent, dans les granges, au bord des lacs...


spectre 3
envoyé par 2sadakobanana -



Belle à faire peur



Dans la cuisine, les forces télékinésiques se déchaînent. Un morceau de miroir se plante dans l'œil de Susanna Love qui devient cette superbe méduse, l'image interdite qui fait saigner ceux qui la regardent. Elle irradie et projette ses faisceaux comme si elle concentrait tous les pouvoirs destructeurs de l'image taboue, originelle : la mère faisant l'amour, source de ce cycle de sang et de terreur.


spectre 4
envoyé par 2sadakobanana -


Finalement, Lacey et Willy remportent la victoire sur les spectres du passé. Alors apaisés, ils peuvent se recueillir sur la tombe de leur mère.
Pourtant, comme dans La Reine des neiges d’Andersen, il reste un dernier éclat du miroir prêt à se planter dans le cœur des enfants pour obscurcir leur âme et les plonger dans un monde de tristesse et de cauchemar.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.