vendredi 3 décembre 2010

Brice Dellsperger Body Double (Belfort 1)

Deux jours au festival de Belfort où j’ai été invité pour avoir commis un petit texte sur Kathryn Bigelow.
Je vois d’abord les Body Double série de Brice Dellsperger, expérience cinéphile perverse, où il remake ses films préférés en jouant lui-même tous les personnages mais en conservant plus ou moins la bande-son. Par exemple Pulsions où il joue à la fois Angie Dickinson et... Angie Dickinson, double prenant la place du dragueur aux lunettes noires. C’est donc elle-même que Kate Miller poursuit dans le musée. Ce qui est la vérité du film et s’accorde à la scène de masturbation du début... Dellsperger remake mais aussi efface : certains personnages (la petite fille asiatique qui fausse compagnie à ses parents n’existe plus que par le son). Le principe étant qu’il contamine tous les plans et tous les personnages ; il substitue par exemple aux figurants du musée Angie Dickinson 2 et la place dans des plans où l’homme en noir n’apparaissait pas à l’origine. C’est une scène que je connais bien (puisque j’ai écrit ma maîtrise, précisément et exclusivement sur cette fameuse scène du musée) et pourtant je n’arrivais plus à me rappeler exactement les plans originaux au fur et à mesure que Dellsperger les reproduisait et les modifiait.
Les morceaux choisis permettaient de suivre l’évolution technique de Dellsperger mais aussi de le voir substituer à sa propre image celle d’un acteur/performeur très impressionnant : le reptilien Jean-Luc la Verna, au visage et au corps tatoué et piercé. Au niveau technique, Dellsperger bénéficie de plus d’argent mais aussi d’une technique assez impressionnante de composition. La Verna joue tous le rôle mais également se croise, s’attrape ou lutte avec lui-même. Excepté quelques légères vibrations de l’image l’illusion est parfaite comme dans ce remake de la scène de joute virile de Love de Ken Russel. Impressionnant aussi ce remake de Eyes Wide Shut où Dellsperger ne se contente pas de refaire les scènes mais le restructure : la scène du réveillon s’emboîte à l’intérieur de celle de la messe noire.
En fait ses films me font penser à des rêves étranges de cinéphiles. J’ai rêvé d’Eyes Wide Shut et c’était bizarre, tous le personnages étaient interprétés par le même acteur...
Eyes Wide Shut est d’ailleurs peut-être une étape chez Dellsperger qui s’affranchira sans doute du remake puisque son univers propre semble déjà autonome, en particulier grâce à la Verna qui apparaît comme le corps idéal, infiniment modifiable, s’accordant à toutes les métamorphoses.



Voir les Body Double ici
http://www.bricedellsperger.com/

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