lundi 8 août 2011

Cartes sur table (Jess Franco, 1965)



Je n’avais jamais vu avec attention Cartes sur tables de Jess Franco, la faute à des copies vidéos antédiluviennes. La collection DVD «Gaumont à la demande», permet de le découvrir dans une copie très correcte. Le film m’avait fait longtemps rêver à cause d’un titre erroné dans Vampirella : "Lemmy Caution contre les robots", ce qui laissait présager une suite officieuse à Alphaville. Si Cartes sur table (titre qui ne veut rien dire) s’en rapproche par le thème des humains robotisés, vidés de leur personnalité, et la présence d’ordinateurs dotés de parole, nous sommes bien davantage sur les terres franciennes que godardiennes. Point de Lemmy caution mais Al Pereira, figure récurrente de détective qu’interprètera plus tard Howard Vernon et Franco lui-même. Si Pereira deviendra un personnage trouble et magouilleur, il possède pour l'instant le panache et la décontraction des autres personnage d’Eddie Constantine, mais lancé dans un serial de science-fiction trépidant. Les robots humains rappellent les figures de golems récurrentes du cinéaste inaugurées par le Morpho Lautner de L’horrible D’Orlof. Quant aux lunettes qui transmettent leurs ordres aux esclaves, elles les font ressembler à une armée de Peter Sellers période What’s New Pussycat.
Françoise Brion joue une espionne maniant la cravache et vêtue de vinyl blanc. Dans le cadre d’un divertissement quasi familial, les figures fétiches de Jess Franco sont bien présentes, révélant ce qu’elles ont d’humoristique.
Si Cartes sur table s’avère le meilleur des policiers parodiques tournés par Constantine, c’est aussi par le souvenir qu’a Jess franco d’Alphaville et des possibilités sculpturales du fascinant visage de l’acteur. Franco ne bride pas la fantaisie blagueuse de l’acteur mais il le replonge aussi, grâce à une magnifique photographie wellesienne, dans son terreau originale : le film noir. Constantine, avec son étrange visage de lézard humain, laisse sourdre une fièvre étrange, en rupture avec le scénario décontracté de Jean-Claude carrière. C’est bien entendu le regard du voyant, familier aux personnages de Franco. On enfile les lunettes noires des robots humains au visage doré et on pénètre dans un autre monde, où rien n’est vrai et tout est possible. La fantaisie, et l’enfance éternelle de Constantine est ici une autre forme de l’onirisme propre à Franco qui permet de passer en un clin d’œil de fumeries d’opium chinoises aux cabarets d’Alicante.











Parmi les personnes disparues : Serge Silberman à Alexandrie ; André S. Labarthe à Bamako.

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