vendredi 6 avril 2012

Joseph Cornell : le monde dans une boîte

On pourrait aller à Londres rien que pour acheter des livres. A Waterstones, la librairie de Piccadilly, je trouve le bel ouvrage de Diane Waldman : «Joseph Cornell, Master of Dreams».


Missing Girl (1962)


Joseph Cornell (1903-1972) vivait à New York avec sa mère et son frère handicapé, pas totalement retiré de la vie artistique de son temps, mais timide et rêveur.
Cette existence de reclus a-t-elle motivée sa passion pour les boîtes et les miniatures ?
Son idéal féminin était par dessus tout les ballerines, soit des filles-poupées, tournoyant sur les scènes des théâtres, comme Olympia l’automate d’Hoffman.
Miniature encore que Rose Hobart (1936), collage de fragments de East of Borneo et chef-d’œuvre de l’expérimental pop.  Couper, démonter et remonter les mouvements de Rose Hobart, c’est en faire sa propre ballerine-automate. D’ailleurs, le film original était l’œuvre de George Melford, cinéaste qu’on aurait bien oublié s’il n’avait réalisé la version espagnole du Dracula de Browning avec la belle Lupita Tovar et le cabot élégant Carlos Villarias, tourné à la nuit tombée dans les mêmes décors que la production Universal. Un cinéaste dont le destin passe ainsi par la copie et la reproduction. 
Cornell aimait Rose Hobart, mais aussi Lauren Bacall et Edy Lamarr... Peut-être aimait-il la belle actrice d’Extase de Machaty pour son autre carrière, moins connue,  de physicienne sous le nom de Hedy Kiesler Markey qui avec son ami le compositeur George Antheil (Le Ballet mécanique) déposa un brevet de codage des transmissions, appelé «spectre»,  utilisé pour guider les torpilles américaines, mais qui servit plus tard aux  communications de la NASA avec la navette spatiale et est à l’origine du... wifi. (la fiche Wikipedia d’Edy Lamarr ici)

Sans titre (1932)

Joseph Cornell créait donc des boîtes où il collait ses rêves victoriens d’enfants-étoiles, de perroquets et autres oiseaux fantastiques, de danseuses, de fillettes kidnappées dont l’avis de recherche est à jamais conservé. 
(Sur Edith Kiecorius lire ici)
Les boîtes de Cornell, où les figures et objets sont multipliés et séquencés, sont déjà des films et donne vie et mouvement à ses fétiches. La boîte de Cornell serait donc un cercueil inversé où les objets abandonnés du monde sont recueillis pour être ramenés à la vie.
Avec Hamlet, Joseph Cornell pourrait dire : «Je pourrais être enfermé dans une coquille de noix et me regarder comme le roi d'un espace infini.»

The Crystal Cage (1942)

Swiss Shoot the Chutes (1941)



Rose Hobart (extrait)





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